Flammes colorées

Un article du site scienceamusante.net.

C'est un des principes de base de la pyrotechnie qui permet de donner des couleurs aux fusées d'artifice ou aux feux de Bengale. Certaines couleurs particulièrement difficiles à obtenir (comme le bleu) sont de véritables secrets d'artificiers et sont jalousement conservés... En plus des couleurs, on peut faire des étincelles.

C'est aussi par cette méthode que les jongleurs colorent les flammes de leurs bâtons, en ajoutant à l'alcool des produits chimiques. Par contre, il n'est pas possible d'utiliser cette méthode pour colorer les flammes de bougies ou de briquet car les sels métalliques ne peuvent pas se dissoudre dans la cire ou le gaz.

1 Précautions

Outre les précautions en chimie qui sont d'usage, cette expérience comporte les attentions suivantes :

  • Certains produits utilisés sont irritants SGH07, nocifs SGH08 ou toxiques SGH06. Porter des gants et des lunettes de protection.
  • Il faut prendre garde à ne pas mélanger les solutions et toujours tremper une tige en bois dans la même solution.

2 Matériel

3 Protocole expérimental

3.1 Baguettes en bois

Flammes colorées, de gauche à droite : violet pâle (potassium), rose fuchsia (lithium), rouge (strontium), orangé (calcium), jaune (sodium). Crédit photo : © 2006 S. Querbes pour Anima-Science et Les atomes crochus.
  • Préparer les solutions de sels métalliques en introduisant dans chaque tube l'équivalent d'une pointe de spatule de poudre. Laver la spatule entre chaque poudre de manière à ne pas faire de mélanges. Remplir les tubes aux 2/3 avec de l'eau et plonger une tige en bois dans chaque flacon.
  • Au-dessus de la flamme du chalumeau (la plus bleue possible), faire passer tour à tour les tiges en bois imbibées des solutions de sels, en approchant la tige sur le bord de la flamme. Observer les différentes couleurs : bleu, vert, vert pâle, rouge, orangé-rouge, jaune-orange, lilas, rose fuchsia.

3.2 Photophores colorés

  • Les sels étant légèrement solubles dans l'éthanol SGH02 ou le méthanol SGH02SGH06SGH08, on peut en dissoudre l'équivalent d'une spatule dans quelques mL, et placer ces solutions dans un bol avec un coton imbibé.
  • On allume le coton. Au début, la flamme est peu colorée, mais à mesure que la température augmente la flamme prend une belle coloration.
  • Attention à placer les coupelles sur un support stable et hors de portée d'enfants ou animaux.

3.3 Lance-flammes colorées

On utilise des pulvérisateurs en plastique (donc inertes par rapport aux sels métalliques).

  • L'équivalent d'une spatule de chaque sel est dilué dans un mélange 50% eau + 50% éthanol environ. Si le sel n'est pas complètement dissout, filtrer la solution avant de l'introduire dans le pulvérisateur. Les couleurs pâles du potassium et du baryum ne seront bien visibles qu'avec le méthanol, dont la flamme de combustion est parfaitement incolore.
  • Pulvériser la solution dans la flamme d'un briquet ou d'un chalumeau, en faisant attention à ne pas respirer les vapeurs et à ne pas diriger la flamme vers une personne, un animal ou des objets inflammables.
  • On peut remarque que le sulfate de cuivre donne des flammes vertes, alors que le chlorure de cuivre donne des flammes bleues-vertes.

4 Explications

  • Lorsqu'un métal sous forme de sel est placé dans une flamme assez chaude, celui-ci absorbe de l'énergie puis la restitue sous forme de lumière. Si la lumière émise appartient au domaine du visible, nous observons une couleur. D'autres métaux peuvent émettre dans le domaine de l'ultra-violet mais nous ne le voyons pas.
  • La couleur de la flamme n'est pas reliée à la couleur de la solution du sel métallique. Par exemple, la solution de sulfate de cuivre est bleu et sa couleur de flamme est verte. De nombreux ions métalliques donnent des solutions colorées (cobalt, nickel, fer...) mais n'ont pas de couleur de flamme.
  • Cette expérience peut être utilisée pour montrer que les électrons des atomes sont placés sur des niveaux ayant une énergie bien déterminée et pas n'importe comment. Lors de l'excitation par la chaleur, les électrons passent des niveaux stables à des niveaux instables (plus hauts en énergie). En se désexcitant, ils retournent à leur niveau d'origine et émettent un photon (lumière) d'une longueur d'onde bien précise (couleur). On dit que le spectre d'émission atomique est un spectre de raies ou discontinu car il ne contient que certaines couleurs et non pas toutes les couleurs, par opposition au spectre de rayonnement du corps noir comme dans l'expériences des étincelles. Ceci peut illustrer le modèle théorique de l'atome décrit par Niels Bohr.
Élément Cation Spectre d'émission de flamme[2] Couleur observée
Cuivre Cu2+ Spectre du cuivre Vert (ou bleu selon le sel)
Baryum Ba2+ Spectre du baryum Vert pâle / Jaune
Strontium Sr2+ Spectre du strontium Rouge
Calcium Ca2+ Spectre du calcium Orangé-rouge
Potassium K+ Spectre du potassium Lilas
Lithium Li+ Spectre du lithium Rose fuchsia
Sodium Na+ Spectre du sodium Jaune-orange
Spectre visible (pour comparaison)
Spectre visible
  • À propos du cuivre, le contre-ion (chlorure ou sulfate) peut avoir une influence sur la couleur. En effet, l'anion modifie très légèrement l'environnement électronique du cation. L'ion cuivre donne généralement à des flammes vertes, mais en présence de chlorure la flamme est bleue.
  • Les verriers de laboratoire, qui font chauffer le verre avec des chalumeau pour le ramolir et le modeler, observent à chaque fois la flamme jaune et intense du sodium. En effet, le verre, en plus de la silice SiO2, contient d'autres substances minérales telles que Na2O. Afin de ne pas être éblouis par cette lumière intense, ils utilisent des lunettes teintées en bleu de cobalt qui filtre les longueurs d'ondes d'émission du sodium. Bunsen[3] (inventeur du bec Bunsen) et Kirchhoff[4], deux chimistes allemands du XIXe siècle, avaient déjà utilisé ce filtre bleu pur montrer que, dans un mélange contenant les ions sodium et potassium, la flamme lilas (pâle) du potassium était bien présente mais masquée par la flamme jaune du sodium. C'est d'ailleurs eux qui avaient observés et tenté d'interpréter scientifiquement, pour la première fois, ce phénomène d'émission atomique. Ils avaient ainsi inventé une nouvelle méthode d'analyse : la spectroscopie[5].

Remarque : on retrouve ces couleurs de flamme dans d'autres expériences de chimie : du feu sans allumette ni briquet, le feu au lac, les poudres pyrotechniques.

Pulvérisation d'une solution alcoolique de sulfate de cuivre.
Pulvérisation d'une solution alcoolique de nitrate de strontium.

5 Références

  1. Les chlorures de ces métaux peuvent être remplacés par des nitrates ou des sulfates ; ces derniers sont cependant moins solubles dans l'eau ou l'alcool. Attention au caractère comburant SGH03 des nitrates pouvant exalter les réactions de combustion !
  2. Pour consulter des spectres très précis, visitez le site suivant : http://webmineral.com/help/FlameTest.shtml
  3. Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_Wilhelm_Bunsen
  4. Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Gustav_Kirchhoff
  5. Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Spectroscopie